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Libération
TRIBUNE

Alors que le régime d'Ankara continue à persécuter les Kurdes, les Quinze acceptent sa candidature à l'Union. Au risque de brouiller le projet politique européen. Peut-on européaniser la Turquie?

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publié le 13 mars 2000 à 22h53

En décembre dernier, le sommet des Quinze, réuni à Helsinki, est

convenu d'accorder à la Turquie le statut de candidat à l'Union. La sympathie suscitée par le terrible tremblement de terre d'août 1999 a été mise à contribution pour justifier aux yeux du public cette décision due, pour une large part, aux fortes pressions américaines. Washington a voulu faire d'une pierre deux coups: récompenser une alliée fidèle et dévouée en en faisant payer la facture à l'Europe et brouiller le projet européen pour que l'Union ne reste qu'une zone de libre-échange sans identité politique, donc incapable de s'affirmer un jour face à la domination américaine. Cette décision, lourde de conséquences pour l'avenir européen, n'a suscité de véritable débat ni dans l'opinion ni au Parlement français. A peine a-t-on entendu quelques libéraux comme Valéry Giscard d'Estaing contester ce choix au nom de la géographie, tandis qu'à gauche, Jack Lang invoquait la situation déplorable des droits de l'homme en Turquie, qui avait d'ailleurs valu à celle-ci d'être écartée de la liste officielle des candidats arrêtée au sommet européen de Luxembourg, en 1997.

A cette occasion, certains leaders européens avaient déclaré qu'un Etat tortionnaire n'aurait pas de place à la table européenne. Le régime turc n'a guère changé depuis. Bien au contraire, avec l'arrivée au pouvoir, en avril 1999, d'une coalition ultranationaliste comprenant une forte composante d'extrême droite, il s'est nettement endurci. Force est donc