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Libération
TRIBUNE

Après la victoire de Chen Shui-bian, la Chine et les démocraties occidentales doivent revenir sur le vieux mythe de la réunification. Taiwan: le réalisme démocratique.

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par François GODEMENT
publié le 22 mars 2000 à 23h24

Voici deux fois en quatre ans que les citoyens de Taiwan défient la

menace militaire de la Chine populaire, en élisant le candidat que les dirigeants communistes souhaitaient le plus éviter. En 1996, c'était Lee Teng-hui, premier président autochtone mais toujours président du Kuomintang. Aujourd'hui, c'est Chen Shui-bian, fils de paysans pauvres de l'île qui a commencé son ascension par l'excellence scolaire à l'université nationale de Taiwan, et l'a poursuivie en défendant le droit à l'expression politique de l'opposition sous la dictature.

N'est-il pas grand temps de revenir, en Chine comme dans les démocraties occidentales, sur les contresens et les mythes qui ont été propagés à propos de Taiwan et de la réunification? Au sein du petit lobby des affaires avec la Chine qui s'agite en France comme aux Etats-Unis, Lee Teng-hui a été dénoncé comme un provocateur, un traître à la nation chinoise, un agent à peine déguisé du Japon. En réalité, si Lee Teng-hui, cet ex-marxiste qui avait très tôt bénéficié de la protection personnelle de Chiang Ching-kuo, n'était pas survenu à temps pour ouvrir et taïwaniser l'appareil de son parti, la démocratie taïwanaise aurait eu raison bien plus tôt de la machine du Kuomintang. Celui-ci a été rejeté non pour ses échecs (ce parti a fait le miracle économique de l'île") mais pour son arrogance: à Taiwan comme en Chine, l'avènement de l'économie moderne signifie aussi l'émancipation du citoyen par rapport à la bureaucratie.

L'art de la diplomatie