Quatorze ans après avoir quitté l'Hôtel de Matignon, Laurent Fabius
effectue sa rentrée gouvernementale comme numéro deux de l'équipe Jospin avec le portefeuille considérable de ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie. Aussitôt s'élève un fracas assourdissant: le diable est entré dans la maison, Lionel Jospin vient d'ouvrir la porte et d'offrir le plus beau fauteuil à son éternel rival, la guerre des deux roses ne peut que se rallumer, un bras de fer entre les deux héritiers de François Mitterrand est inéluctable, une seconde cohabitation commence. Tout cela est absurde, paradoxal et même dénué de sens. A deux années des échéances qui détermineront leur destin, Lionel Jospin et Laurent Fabius ont intérêt et besoin, l'un comme l'autre, d'additionner leurs forces et non pas de les diviser, de réussir ensemble et non pas d'échouer conjointement. Le Premier ministre et le Deuxième ministre ont assez de réalisme et d'expérience pour savoir que si l'un des deux succombait au syndrome du scorpion qui ne peut s'empêcher de piquer son allié, ils se noieraient de concert.
Au demeurant, ils n'ont pas décidé de coopérer et d'unir leurs forces à l'improviste. Ils évoquent le sujet en tête à tête, d'abord implicitement puis beaucoup plus directement depuis le mois de décembre, à l'occasion de plusieurs rencontres ou contacts. Autant l'entrée inattendue et diversement appréciée de Jack Lang a été décidée au tout dernier moment, dans les trois jours qui ont précédé le remaniem