Personne de bonne foi ne saurait le nier: Philippe Séguin est l'un
des grands talents de la droite parlementaire. Sur cette rive-là, cinq ou six seulement concourent dans la même catégorie que lui. Son éloquence est sans pareille. Avec sa voix de baryton basse, sa densité physique, ses mimiques théâtrales, ses réquisitoires implacables et ses prédictions shakespeariennes, qui donc sonne le glas mieux que lui? Les mauvais esprits relèveront sans doute que ses adjurations churchilliennes peuvent paraître parfois répétitives, qu'il n'adore pas les débats contradictoires et qu'un ticket de métro suffit largement pour noter la liste de ses propositions constructives, mais il serait mesquin de le nier: à la tribune comme en interview, il n'a pas de maître, sinon un Valéry Giscard d'Estaing des grands jours.
Ce n'est pas tout. L'ex-maire d'Epinal possède un charisme sombre, une autorité tumultueuse, un ascendant hérissé qui en imposent. Sa popularité est grande, ses troupes sont maigres, son renom intimide ses alliés. Mêmes ses colères jupitériennes (qu'il a hypocritement niées face à Ruth Elkrief), ses rancoeurs homériques et sa susceptibilité maladive le servent. On y voit tous les signes d'un sauveur suprême. Ayant fort peu gouverné (il a seulement été deux ans ministre des Affaires sociales et de l'Emploi, le temps d'écrire quelques lettres de démission), il a donc peu déçu. Philippe Séguin incarne le mythe du recours.
Il se fait c'est tout à son honneur une haute idée de la