Malgré le renouveau des études merleau-pontiennes en philosophie, amorcées jadis en quasi-solitaire par Claude Lefort et qui aujourd'hui prennent de l'ampleur sous la houlette notamment de Renaud Barbaras, l'oeuvre de Maurice Merleau-Ponty demeure, au niveau d'un large public, méconnue. Les commémorations sartriennes de l'année montrent même que, sur le plan de l'image publique de la philosophie, elle reste dans l'ombre de celle de Sartre et, sur le plan du débat politico-intellectuel, de l'opposition Sartre/Aron. Ses originalités sont le plus souvent invisibles hors des milieux philosophiques. Un fait est significatif: la récente réédition par Gallimard en "Folio" des Aventures de la dialectique, publiées initialement, en 1955, par Merleau-Ponty et introuvables depuis de nombreuses années, est passée jusqu'à présent inaperçue. Il s'agit pourtant d'un livre de philosophie politique central dans la nouvelle période historique ouverte par la chute du mur de Berlin.
Aux lendemains de la guerre, Merleau-Ponty s'est affronté en deux temps au "problème communiste": il est passé d'une position "attentiste" à l'égard de l'URSS, dans Humanisme et terreur (HT, en 1947), alors qu'il se sentait des affinités avec un certain "marxisme", à une position résolument critique, qualifiée d'"a-communiste", dans les Aventures de la dialectique (AD), alors qu'il s'éloignait d'un cadre de référence exclusivement "marxiste". C'est ce qui le conduisit à rompre avec Sartre et les Temps modernes en 195