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Libération
Critique

Eltsine et sa mémoire étriquée

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publié le 30 octobre 2000 à 5h54

Les grands hommes sont souvent petits et cachent des considérations futiles sous leurs coups de génie. Ainsi, le 28 juin 1996, lorsque Boris Eltsine rencontre le général Alexandre Lebed, il ne retient guère que son accoutrement: «Des chaussures noires, des chaussettes blanches et une veste à carreaux voyante.» Un pacte fut pourtant scellé ce jour-là avec le général au si mauvais goût, qui allait être décisif dans la réélection d'Eltsine.

Les mémoires d'hommes d'Etat sont généralement des entreprises d'autojustification, et le dernier livre d'Eltsine ne faillit pas à la règle. Après huit ans d'un règne marqué par des crises frôlant parfois la catastrophe, l'ex-président russe affiche une conscience en paix. Il reconnaît bien quelques erreurs, essentiellement en économie. Mais, à le lire, ses objectifs «stratégiques» ­ ancrer la démocratie, l'économie de marché... ­ ont, au bout du compte, été atteints. Et Vladimir Poutine, le dauphin devenu Président, n'a plus qu'à parachever l'oeuvre.

Eltsine se raconte à l'écrit comme il s'exprime à l'oral. Dans un style exécrable, avec une franchise confinant parfois à la grossièreté, des digressions vengeresses, des envolées poétiques pataudes et, plus rarement, des accents de sincérité. La lecture de son livre est, en outre, desservie par une édition médiocre, avec des fautes d'orthographe et de noms propres (le patron de presse Vladimir Goussinski devient Pavel Goussinski).

Pas plus que les précédents, ce troisième tome de Mémoires ­ qui c