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TRIBUNE

Universels Beatles

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par Jean-Charles AMBROISE et Christian LE BART
publié le 15 novembre 2000 à 6h37

Les Beatles se sont séparés il y a plus de trente ans; John Lennon a été assassiné il y a plus de vingt ans. Rien pourtant ne semble démentir l'engouement pour les quatre de Liverpool. Est-il possible de fournir à cette Beatlesmania persistante et largement mondialisée une explication sociologique? Sociologique, c'est-à-dire qui s'efforce de ne succomber ni aux mythologies simplistes et enchantées («leur musique est indépassable, ils sont géniaux», etc.), ni au mythe inversé d'un complot qui profiterait à une industrie culturelle nécessairement suspecte («matraquage médiatique, filon exploité jusqu'à épuisement», etc.). Le succès des Beatles, reproduit génération après génération et gagnant progressivement les pays a priori les plus éloignés du contexte culturel dans lequel ceux-ci ont produit leur oeuvre, autorise un verdict d'universalité.

Mais qu'est-ce au fond qu'une oeuvre universelle? Comment expliquer l'universalité, si l'on choisit de rompre tout à la fois avec le mythe romantique du génie qui s'imposerait par sa seule force et avec les conceptions cyniques en terme de matraquage médiatique? Une sociologie fine des réceptions auxquelles cette musique a donné lieu (et donne lieu encore aujourd'hui) permet d'avancer quelques éléments de réponse. L'oeuvre des Beatles est fondamentalement marquée du sceau de l'ambivalence. C'est, au sens qu'Umberto Eco donnait à ce terme, une oeuvre ouverte, c'est-à-dire ambiguë, disponible à toute forme d'appropriation. Parce qu'elle ne