Nombreux sont ceux qui n'ont pas encore retenu le nom du nouveau prix Nobel de littérature français, qui a été officiellement distingué jeudi à Stockholm. Et pour cause, son nom, Gao Xingjian, qui révèle bien ses origines chinoises, n'est pas vraiment entré dans le vocabulaire courant. Mais il est plus surprenant de penser que la grande majorité des Chinois ne le connaissait pas non plus, ou en tout cas pas avant le 12 octobre dernier, et, pire encore, que pratiquement aucun d'entre eux n'a jamais eu accès à son oeuvre. Pourtant l'attribution du prix Nobel de littérature à un écrivain en langue chinoise met fin à une longue attente: voilà un siècle que la Chine attendait qu'un écrivain chinois soit enfin primé.
Lu Xun est le premier qui aurait pu mériter cette grande distinction mais il est mort trop tôt, en 1936. En 1938, l'Académie suédoise a décerné sa distinction suprême... à Pearl Buck, ce qui a déplu à la fois aux Chinois et aux Américains, qui ne se sentaient pas représentés par l'auteur de la Terre chinoise. Depuis quelques années, le nom du poète Bei Dao était régulièrement pressenti comme un potentiel prix Nobel de littérature. Il y a vingt ans, c'est le nom de Ba Jin (Pa Kin) qui était le plus souvent avancé. Mais il a fallu attendre l'an 2000 pour que la littérature chinoise soit enfin reconnue. Cette omission apparaissait comme incompréhensible aux yeux des Chinois, car leur plus grand sujet d'orgueil reste sans aucun doute leur longue tradition littéraire. Tous