De nombreux témoins s'en souviennent encore: Studio 99, la petite chaîne indépendante de radiotélévision bosniaque incarnait durant le siège de Sarajevo la résistance à tous les nationalismes. Son directeur, Adil Kulenovic, n'est pas un anonyme. Alors même que les obus pleuvaient sur la capitale bosniaque, il appelait jour après jour ses concitoyens à ne pas incriminer en bloc «les Serbes», pour mieux pointer du doigt «les Serbes de Karadjic». Tout au long du conflit, il a veillé à maintenir une équipe pluriethnique au sein de sa rédaction. Ainsi, Kulenovic invitait les Sarajeviens, privés d'électricité et suspendus à leur transistor, à garder espoir et un semblant de dignité. Studio 99 leur rappelait qu'ils avaient su auparavant coexister en paix. La station l'a payé au prix fort: bombardement de ses locaux, intimidations, etc.
Aujourd'hui, dans la Bosnie oubliée des accords de Dayton, Studio 99 continue d'émettre, mais pour combien de temps encore? Depuis la fin de la guerre, la chaîne a réussi à maintenir coûte que coûte sa ligne éditoriale. Les conditions de travail y demeurent des plus précaires: des équipements concédés par l'Unesco, une équipe de jeunes journalistes peu payés, faute de recettes publicitaires et... encore un émetteur plastiqué en décembre 1999. C'est que Studio 99 consacre beaucoup de son temps d'antenne à l'information et au débat public. Dans un pays administré par les occidentaux via l'OHR (Office of Higher Representative), la station a ainsi su rest