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Libération

Caritatif à la con

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publié le 6 mars 2001 à 23h53

A force de courir de plateau en plateau, de RTLiennes Grosses Têtes en variétés télé à prétexte charitable, il fallait bien que Jean-Marie Bigard, humoriste spirituel autant qu'un général de la guerre d'Algérie, mît un peu d'ordre dans sa notoriété. Il y consacra dimanche une grosse paire d'heures en courant, paraît-il, un semi-marathon pour promouvoir, rapporte l'AFP, son association d'aide aux handicapés, Un bouchon = un sourire. Jusque-là, rien que de très ordinaire: ne pas mettre en association ses bons sentiments, par les temps qui courent en pompes de sport et kimono douillet, équivaut à faire un seppuku audimatique; à l'inverse, que la bonne oeuvre identifie le bienfaiteur, et c'est le bingo assuré...

Le problème, avec Bigard et des tas d'autres de sa sorte, c'est qu'à force de multiplier les bonnes oeuvres comme l'autre les pains, le sens s'y perd, inéluctablement. De Téléthon en Sidathon, de Restos du coeur en piles de godasses protestant contre les mines antipersonnel, le «bon coeur» individuel s'instaure un peu plus, chaque samedi soir de variétés télé, comme béquille institutionnelle des carences budgétaires de l'Etat. Comme d'autres collectent des pièces jaunes pour faire aux gosses hospitalisés une aumône dérisoire en nourrissant l'illusion d'une universelle fraternité, Bigard ramasse des bouchons qu'il fourgue 500 balles la tonne à un industriel retraiteur; avec les pécunes qu'elle tire de ce mécanique trafic, l'assoc' de Bigard achète des fauteuils roulants. A