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Libération

Le sourire des bouddhas

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publié le 10 mars 2001 à 23h58

Les taliban ont décidé de détruire un des trésors de l'humanité, par dogmatisme religieux. Ces statues sont des vestiges de ce qui fut un moment de syncrétisme entre l'Occident et l'Orient, une jonction entre la Grèce et l'Inde. Leur style est dénommé gréco-bouddhiste, soulignant par-là la rencontre esthétique entre deux humanismes.

Du point de vue de l'histoire de l'art, c'est une décision déplorable. Du point de vue géopolitique, c'est la résurgence de la rage du fanatisme religieux islamiste à couper la route de la soie. Mais les temps ont changé : les échanges euro-asiatiques ne dépendent plus des pistes périlleuses de l'Afghanistan. Rien ne peut plus arrêter la jonction entre l'Europe et la Chine, grâce aux progrès techniques.

Du point de vue bouddhiste, je souhaite rappeler cette simple histoire : après l'illumination du Bouddha Çakyamuni, les dieux de l'Inde se concertèrent, et Indra vint lui rendre hommage.

«' Bienheureux, que pouvons- nous faire pour protéger le trésor de la Bonne Loi ?»

Le Bienheureux répondit :

«Pourquoi voulez-vous protéger le Dharma ? Le Dharma se protège lui-même.»

Si la décision funeste des taliban peut rappeler au monde leur inhumanité, les violences dogmatiques et cruelles auxquelles est soumise la «moitié du ciel», pour reprendre un terme chinois décrivant les femmes, alors la destruction des statues gréco-bouddhistes protège la bonne loi.

Du temps des gardes rouges et de la Révolution culturelle, bien des temples bouddhistes ont été dévastés, et