S'il est, en économie, une conviction fermement établie, bien au-delà du cercle restreint des spécialistes, c'est l'idée que les choses s'échangent en fonction de leur valeur intrinsèque. Là où les économistes divergent, c'est sur la nature de cette valeur. Pour certains, c'est le travail qui en est la source; pour d'autres, c'est l'utilité. Mais au fond cette divergence est secondaire, ce qui importe dans tous les cas, c'est l'idée que les rapports d'échange ont un fondement objectif qui s'impose aux acteurs, quels que soient leurs croyances ou leurs projets. Pourtant, cette image d'un monde de la valeur ordonné et stable, à l'abri des passions humaines, est mise à mal par l'observation économique la plus superficielle. Ce qui frappe, tout au contraire, c'est l'extrême versatilité des évaluations, leur caractère éminemment fuyant et éphémère. La situation actuelle du secteur des télécommunications est, de ce point de vue, exemplaire. Prenons l'exemple d'Orange, société introduite en Bourse par France Télécom le 12 février 2001. Lorsqu'on interroge les experts de ce domaine avant l'introduction, ils donnent une fourchette de prix se situant entre 70 et 85 milliards d'euros. Aujourd'hui, le marché boursier estime cette valeur aux environs de 43 milliards d'euros, ce qui correspond à une estimation moitié moindre de celle calculée par les analystes. En à peine un mois! On pourrait aisément multiplier les exemples. A l'évidence, ce qui est ici en cause, ce ne sont pas les capac
Il n'y a pas de valeur objective
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par André ORLEAN
publié le 12 mars 2001 à 23h58
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