Et il est de fait qu'à force, notre indignation s'émoussait dans la nullité de ses effets. Tant d'aberrations sociales, morales et juridiques dans l'usage américain de la peine de mort l'avaient épuisée, si bien qu'elle ne protestait plus que mécaniquement, en découvrant tous les jours un autre probable innocent électrocuté, un débile mental fusillé ou une grand-mère piquée après des années de repentir... Si bien qu'elle eût presque soufflé, notre indignation, à la perspective d'une exécution capitale normale; celle, par exemple, d'un citoyen américain de préférence blanc de peau, issu d'une upper middle-class et qui ne serait pas congénitalement taré, au terme d'une instruction respectueuse de ses droits et aux termes d'un verdict énoncé sans haine et sans passion. Découragés, nous n'étions pourtant pas au bout de notre indignation, que le cas Lionel Tate vs l'Etat de Floride sollicite à nouveau.
Pour ce gamin de 12 ans et 76 kilos au moment des faits, noir de peau et un peu simple d'esprit qui, en «jouant» à reproduire sur Tiffany Eunick (6 ans), des techniques de catch «vues à la télé», la tua, le juge de Fort Lauderdale n'a pas prononcé un verdict de mort, pour la seule raison que l'accusé n'avait pas 17 ans. A 14 ans, Lionel Tate n'a été condamné «qu'» à la réclusion à perpétuité, mais dans une prison pour adultes, sans possibilité de libération conditionnelle. Le procureur a certes révélé que si la défense avait plaidé coupable, trois années de détention et dix de liber