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Libération

Douceur nucléaire

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publié le 29 mars 2001 à 0h14

Dans l'Allemagne calme et ennuyeuse, un train avance et recule, porteur d'apocalypse rebaptisé Castor. Il va et il vient, ce train, au rythme que lui imposent des militants antinucléaires, dans d'aléatoires blocages de voies. Mais tout le monde sait bien que le convoi de déchets finira bien par arriver à son but, le centre de stockage de Gorleben, aussi sûrement que la chèvre de M. Séguin, au petit matin, sera mangée. C'est qu'il s'agit, en effet, moins de l'empêcher que de le retarder. Il s'agit qu'il tienne l'écran. Alors, on fait mu-muse à la guéguerre d'images, unique et indigent enjeu du convoiement. Très loin de Narita (l'aéroport de Tokyo, dont la construction avait donné lieu à des mois de batailles dérangées et dignes des grandes productions du cinéma de Kurosawa), très loin même du plateau du Larzac, la protestation écolo-teutonne accouche d'un feuilleton au dénouement trop prévisible. Tout le monde a bien compris qu'on jouait, là... Les autorités ont compris, les manifestants ont compris, et même les flics ont compris. D'où l'ahurissante série de gags, volontaires ou non, offerts depuis trois jours à nos yeux et oreilles ébaubis. Sur la ligne nucléaire, cent trente «médiateurs de conflits» (sic) règlent la circulation. Au protestataire allongé sur les rails, le cogne, qui a rangé sa matraque, demande trop courtoisement s'il consent à marcher ou préfère qu'on le porte; s'il veut bien (Bitte sehr, Meine Dame, mein Herr) se donner la peine d'arborer ce casque antibru