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Libération
Critique

Mitterrand et le déni de mémoire

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Livre. Les ambiguïtés de l'ancien président sur Vichy.
publié le 27 avril 2001 à 0h36
(mis à jour le 27 avril 2001 à 0h36)

A l'inverse de Paul Nizan, François Mitterrand ne voulait laisser personne dire qu'avoir vingt ans serait le pire âge de la vie. On peut lire le dernier opus post-mortem de Georges-Marc Benamou consacré à l'ancien président de la République, avec cette mise en perspective. Evadé récidiviste du stalag, il débarque à Vichy à l'âge de 25 ans et découvre, d'une certaine façon, l'action politique avec ce que cela suppose de jeux de l'ombre, de goût des réseaux, de jouissance du pouvoir, tout ce dont il n'avait jusque-là qu'une vision littéraire et qui lui servira de viatique pour son exceptionnelle carrière.

Cet itinéraire que Lionel Jospin aurait rêvé «plus simple et plus clair» est marqué dès le départ par les ambiguïtés d'un jeune homme qui, par tradition familiale, est en phase avec les valeurs du «Maréchal» mais reste animé d'un profond sentiment patriotique qui l'amènera à la Résistance. Pierre Péan a magistralement décrit cette période de flottement (1) et l'auteur n'apporte rien de plus sur ce plan. Tout au plus livre-t-il, par ses dialogues reconstitués avec un vieil homme au seuil de la mort, quelques éléments complémentaires sur l'incapacité profonde de François Mitterrand à opérer un retour critique sur les années Vichy, cet «Atlantide» de la mémoire française. Le noeud inextricable du déni de mémoire (ce qui n'empêche pas la profusion de souvenirs) est la question soulevée inlassablement par Serge Klarsfeld d'une reconnaissance par la République d'aujourd'hui du crime