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Libération

L'ironie de 1981

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publié le 21 mai 2001 à 0h56

A l'occasion du 20e anniversaire du 10 mai, la plupart des observateurs ont choisi de stigmatiser l'archaïsme du programme de 1981 et des conceptions étatistes qu'il exprimait. De fait, on pourra longtemps se demander comment la gauche française a pu se retrouver à appliquer au début des années 80 un programme fondé sur les nationalisations, à un moment où la Chine communiste avait déjà commencé à privatiser ses entreprises (1979), et où l'URSS s'apprêtait, elle aussi, à libéraliser son économie (1985).

Mais là n'est peut-être pas l'essentiel. Après tout, les socialistes se sont délestés relativement aisément de l'héritage des nationalisations, et il existe d'autres décisions prises au début des années 80 qui pèsent aujourd'hui nettement plus lourd pour Lionel Jospin. En effet, au-delà du programme de nationalisations, le gouvernement issu du 10 mai est également et surtout celui qui a dû, dans le domaine des salaires et des revenus, assumer politiquement des choix que ses prédécesseurs avaient sans cesse retardé. Tout au long des années 70, dans un climat social en pleine ébullition, les gouvernements successifs avaient laissé les salaires progresser structurellement plus vite que la production, espérant ainsi se maintenir plus longtemps au pouvoir. Tout le monde savait que cela ne pourrait pas durer, mais personne ne voulait porter la responsabilité de l'ajustement. Fraîchement arrivés au pouvoir, les socialistes commencèrent par donner un ultime «coup de pouce» au Smic, so