Il faut un sacré culot pour intituler un livre l'Ordre économique mondial, dans un paysage qui justement apparaît à l'opinion comme plus chaotique que jamais. Il est vrai que le sous-titre est plus explicite: «Essai sur les autorités de régulation». «Eloge» n'aurait pas été mal trouvé, tant il est vrai que ce livre documenté, charpenté comme un cours magistral, défend ces institutions si décriées que sont les FMI, Banque mondiale, Banque centrale européenne, et autorités de régulation. Elie Cohen est de ceux qui n'ont pas digéré les événements de Seattle ou de Prague qu'il qualifie d'«étrange défaite» «devant la coalition improbable de souverainistes, tiers-mondistes, écologistes et syndicalistes». Celle-ci menacerait le parachèvement de l'architecture d'un système de régulation mondial du capitalisme, en gestation depuis cinquante ans, mais qui éclôt réellement dans les dix dernières années, en parallèle avec la libéralisation des échanges.
Il est vrai que l'auteur de la Tentation hexagonale et du Colbertisme high-tech connaît le sujet, pourrait-on dire, de l'intérieur. Il fut de ceux qui suivirent de près la dérégulation du secteur des télécoms, dans sa version française. D'ailleurs, sa narration de la lutte d'influence, politique, institutionnelle, technique entre les tenants du colbertisme et du monopole de l'Etat, et les adeptes des agences de régulation, jusqu'à l'aventure récente de l'UMTS, est tout simplement passionnante. Où l'on découvre, par le menu comment la Fran