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Libération

La marchandisation du vivant

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publié le 28 mai 2001 à 1h01

Aujourd'hui, la nouvelle frontière du capital, c'est le vivant. L'enjeu est considérable puisque toutes les dimensions de l'humain sont concernées: santé, nutrition, éducation, reproduction. Même si on n'en est encore qu'au stade des premiers balbutiements, on ne peut manquer d'être impressionné par l'incroyable dynamisme dont fait preuve le capitalisme dans sa capacité à anticiper et à mobiliser d'immenses ressources sur la foi d'idées encore incertaines. Impressionné, mais également terrifié par tout ce que ce dynamisme véhicule de bonne conscience et de croyance aveugle dans la bienveillance des lois du marché. L'exemple récent des trente-neuf multinationales pharmaceutiques ayant poursuivi le gouvernement sud-africain, parce qu'il avait promulgué une loi autorisant l'achat de médicaments antisida génériques, est de ce point de vue exemplaire. Dans un pays où des millions de personnes, trop pauvres pour pouvoir s'offrir des médicaments sous brevets, sont vouées à la mort, cette attitude fait froid dans le dos par ce qu'elle suppose d'aveuglement face à la situation réelle du monde. Il est vrai qu'aujourd'hui la conquête des nouveaux espaces ne se fait plus comme au temps de l'Ouest sauvage avec des fusils et des clôtures. Désormais, la course à la propriété passe par le dépôt de brevets qui définissent les droits nouvellement acquis et par des avocats qui les défendent. Encore a-t-il fallu pour cela que le vivant devienne brevetable. Jadis, seules les inventions pouvaient