Donc, afin de réduire le nombre de victimes du tabac, culpabiliser le consommateur; solliciter la faculté pour donner une caution scientifique aux mots qui font peur («tabagisme passif» n'est pas mal), augmenter le prix de l'herbe à Nicot et conserver toujours l'objectif de l'éradiquer autant que faire se peut (à terme, partout; l'Amérique, quoi!). Afin de réduire la mortalité routière, adapter la méthode aux contraintes économiques spécifiques à l'industrie automobile, mais, pour l'essentiel, reconduire les mêmes procédés: augmenter les tarifs, judiciariser les sanctions et culpabiliser l'usager avec des flics partout. Lorsque la peur de l'autre sera aussi prégnante que celle du tabac, et la psychose de l'accident aussi efficace que celle du cancer, les statistiques suivront. Elles témoigneront alors (ou c'est à désespérer de tout) que sera résolue, après celle de la santé publique, la douloureuse question de la sécurité routière.
En attendant, on s'adapte. On essaye, du moins, car c'est une rude gymnastique mentale que d'assimiler cette règle nouvelle qui fait obligation à l'automobiliste de céder le passage à tout piéton engagé «sur des passages protégés ou non par des feux tricolores», sous peine de contravention de 4e catégorie (quatre points de permis). En tentant de la justifier, la Prévention routière argue que la règle ancienne, où le sujet à pied devait s'assurer qu'il pouvait traverser «sans danger immédiat», était ambiguë en ce qu'elle «incitait bon nombre d'autom