Vieille chose, le baccalauréat fête ses deux siècles d'existence et d'aucuns croient encore que, malgré cet état civil, il n'accuse aucune ride. Associée comme une ombre à ce fossile légendaire et vénérable, la dissertation de philosophie n'est guère en meilleur état: date de naissance, 1864, bilan de santé, déplorable. Je corrige l'épreuve de philosophie du bac depuis dix-sept ans, le propos procède d'un constat, pas d'une hypothèse... Baccalauréat de philosophie et dissertation auraient du mal à être d'attaque aujourd'hui, pensés qu'ils furent en regard d'une sociologie dont chacun conviendra qu'elle s'est considérablement modifiée. C'est un euphémisme.
Il y a deux cents ans, en classe terminale on ne compte pas de femmes, pas d'enfants issus de familles modestes, pas d'élèves, bien évidemment, provenant des urbanismes pathogènes et des couches sociales détruites par le capitalisme dans sa version libérale. Le baccalauréat et la dissertation concernent alors des enfants issus du monde des bourgeois qui font la loi. Destinée aux individus rompus aux thèmes grecs, versions latines et subtilités de la rhétorique, l'épreuve sanctionne les docilités nécessaires à la reproduction sociale et se contente de sélectionner l'élite.
Cahin-caha, les deux institutions se sont maintenues à flot, avec quelques changements, certes, mais négligeables, des ajustements, rien dans le fond. On envisage toujours la philosophie comme la discipline reine, qui distingue notre système scolaire parmi c