Au-delà de la fameuse «zone rouge», à l'abri de laquelle se rencontraient quelques chefs d'...tat interchangeables, Gênes a bel et bien eu lieu. Et cela, avant d'être pris en charge par les récits sporadiques qui émergent jour après jour, divers et parfois contradictoires, depuis les témoignages reconstitués sur les tabassages policiers jusqu'à la thèse paranoïaque (et distillée d'autant plus prudemment) des «Tute bianche» de Luca Casarini (1), selon laquelle radicaux et policiers travaillèrent au coude à coude à la destruction de la ville et à la traque des «pacifistes».
Mais Gênes ne devrait rentrer pour autant ni dans l'Histoire, mémoire spectaculaire déjà surchargée, ni dans les annales de ces contre-sommets festifs dont elle fut aussi le parangon. Gênes rejoindra, plus discrètement, les archives d'un savoir à venir, où se croisent la tradition armée et l'anarchisme sous-équipé, le chaos piétonnier et la pratique plus savante du saccage de banques et de boutiques, moins la mémoire confuse d'un désordre autrement dit qu'un savoir résiduel, situé quelque part entre le sursaut autonomiste et la dérive hirsute, le refus de l'ordre réformiste et la simple imitation du désastre.
La guérilla urbaine qui a éclaté par saccades en marge des quatre derniers contre-sommets, loin des clichés sensationnels du casseur onaniste participant comme malgré lui à la grande orgie vandale, n'avait pas pour seules logiques celles du déferlement policier et de l'impuissance des «victimes»: l'organ