Menu
Libération
TRIBUNE

New York, ville-fiction planétaire

Article réservé aux abonnés
Les attentats du 11 Septembre 2001 aux Etats-Unisdossier
Ceux qui y vivent, qui y voyagent ou qui s’y rêvent ont ressenti l’angoisse quand fut touchée la mégalopole symbole.
par Anne RAULIN, maître de conférences à l'université de Paris-V. Elle est l'auteure de «Manhattan ou la mémoire insulaire», Institut d'ethnologie, musée de l'Homme, 1997, et vient de publier «Anthropologie urbaine», Armand Colin, 2001.
publié le 5 octobre 2001 à 1h10

Après le choc et l’horreur des milliers de morts, il ne faudrait pas que l’indignation, la compassion, la pudeur nous empêchent de mesurer la portée hautement symbolique de l’effondrement des deux tours du World Trade Center, mais aussi de la ville éventrée. Il y a bien du symbole global, en particulier pour les terroristes, mais aussi certainement du symbole local pour les New-Yorkais (du monde entier pourrait-on dire).

Du symbole global: il en porte le nom, World Trade Center, centre du commerce mondial, Windows on the World, avec une vue de près de 150 kilomètres à la ronde. Double beffroi infini tout à la fois admirable, comme suspendu au-dessus des eaux atlantiques, et arrogante figure de proue d’un monde magnétique, attirant à son pôle toutes les richesses...

Du symbole local: New York, et Manhattan en particulier, dessine bien une «topographie légendaire», pour emprunter le titre de Maurice Halbwachs, topographie connue de tous, chacun à sa façon. Même si aujourd’hui on pénètre dans la ville par les aéroports de JFK ou de Newark, tout le monde repère dans le pont de Verrazano l’entrée de la baie de New York, puis au pied de Manhattan la double station de la statue de la Liberté et d’Ellis Island, lieu de quarantaine pour tous les passagers troisième classe des navires accostant l’île, après la traversée de l’océan si évidemment comparée à celle du désert. Car New York fut d’abord un havre, un port fourmillant de grandes voilures au long d’East River puis d