On a beaucoup dit que les 5 500 morts du 11 septembre constitueraient la sanglante facture payée par les Etats-Unis pour l’arrogance avec laquelle ils imposent aux plus faibles leur hégémonie. Le fil qui a mené à ce carnage remonte en fait plus loin, et ne concerne pas la seule hyperpuissance américaine sur laquelle l’Europe se défausse un peu vite de ses propres méfaits.
Sa suprématie, désormais si ancienne qu'il ne sait plus se penser en dehors d'elle, a depuis longtemps convaincu l'Occident de trois choses: d'abord que sa volonté d'en garantir la pérennité était parfaitement légitime, ensuite qu'il avait vocation à être le seul énonciateur des normes appelées à régir l'ensemble de l'humanité, enfin que cette dernière sortirait de l'enfance en le prenant pour modèle. Ces certitudes ont revêtu des formes différentes au cours des derniers siècles, mais elles ont d'autant mieux résisté qu'elles reposaient sur un corpus de principes à prétention universelle. Devenir occidental, voilà donc l'horizon proposé à ces «autres» entrés dans l'orbite impériale. Mais, outre le fait que le modèle proposé est le produit d'une histoire singulière, les détenteurs de la puissance mondiale ont multiplié les obstacles à l'imitation. Pour ceux nombreux qui ont raté le coche, l'injonction mimétique s'est métamorphosée en une assignation identitaire qui a dès lors fonctionné comme un rejet de l'autre, mis dans l'impossibilité de devenir le même.
Les voies du «progrès» à l'identique étant pour l