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Libération

L'aveu

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publié le 15 novembre 2001 à 1h37

Eh bien! Voilà qui est dit, et bien dit: toutes les vies ne se valent pas. Notez qu'on s'en doutait, mais ça va mieux en le disant. Même avec la coquetterie qu'aura prise mardi cet assureur anonyme pour révéler que le montant du dédommagement des sinistrés de l'Airbus qui s'est crashé lundi sur New York a été revu à la baisse du simple fait que la plupart de ses victimes sont de nationalité dominicaine. «C'est horrible à dire [...] mais leur indemnisation coûtera moins cher que celle d'Américains, par exemple. Nous estimions le sinistre à 1 milliard de dollars, mais nous avons aujourd'hui abaissé notre évaluation à 500 millions», a confessé le bon apôtre. Passons sur l'incipit étrangement précautionneux («C'est horrible à dire», c'est de l'humour, sans doute; les amis de M. Kessler, patron des assureurs et sous-patron du Medef, nous ont accoutumés à un cynisme plus franc et plus massif). Mais, hormis cette bizarrerie, qui ne souscrirait à l'évidence énoncée? Tout juste pourra-t-on chipoter cette réduction d'un à un demi-milliard, qui établit un rapport de deux à un entre le prix du citoyen yankee et celui du natif de Saint-Domingue. Car c'est quoi, au juste, la République dominicaine? Avec ses quelque 8 millions et demi d'habitants, cette île des grandes Antilles, mobilisée dans un vaste et drastique plan de lutte contre la pauvreté, ne constitue un paradis que dans l'imaginaire pervers des marchands de virées chèrement exotiques. La distribution d'électricité y est aléatoir