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Libération

«Bosna!» vu de Belgrade, ou la psychanalyse serbe

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Le 14 décembre, Bernard-Henri Lévy présentait en Yougoslavie son film sur le martyre de Sarajevo.
par Bernard-Henri Levy et Gilles Hertzog, coscénariste avec Bernard-Henri Lévy de «Bosna!»
publié le 22 décembre 2001 à 2h03
(mis à jour le 22 décembre 2001 à 2h03)

Belgrade ­ la ville blanche, en serbo-croate ­ est grise. Neige et brouillard. Six ans après la fin de la guerre en Bosnie, sept après la sortie de Bosna!, huit ans après notre dernier voyage ­ clandestin ­ à Belgrade, Bernard-Henri Lévy et moi sommes de retour, visas en règle, pour présenter Bosna!, que va diffuser la télévision d'opposition B 92.

Le Rex est un ancien centre communautaire juif, transformé en cinéma. La presse belgradoise a annoncé la séance et notre présence. La salle est pleine. Une voiture de police stationne devant l'entrée. Des flics en civil sont là. Quelques visages amis de jadis, dix ans d'épreuves en plus. Beaucoup de jeunes, trop jeunes pour avoir fait la guerre. Après la projection du film, un débat public est prévu.

Belgrade, c'est, pour le film, et, bien au-delà, nos amis serbes, le moment de vérité. En Bosnie, le public y lisait sa propre tragédie, son abandon, sa résistance, notre solidarité rageuse. En France, en Europe, sa réception, c'était selon le coeur et l'esprit.

Ici, les enjeux sont d'une tout autre dimension. B 92 vient de projeter Yougoslavie, suicide d'une nation, puis le Srebrenica de la BBC. L'heure est venue, après la défaite et un réveil brutal, de regarder l'histoire en face. Sa propre histoire, pour qui, en Serbie, vécut ces années de plomb et de sang. Car la chute de Milosevic, incommode bouc émissaire, n'a rien réglé. Et ces questions restent entières: qu'avons-nous fait? qu'avons-nous cru? qu'avons-nous su? où étions-nous, no