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Libération

Guantanamo

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publié le 15 janvier 2002 à 21h41

Atraiter de la sorte ses prisonniers d'Al-Qaeda, l'administration Bush va bientôt donner l'impression qu'elle ne les assume pas aussi hardiment qu'elle le proclame ­ dans le respect de la personne humaine, de ses droits et de sa dignité. Bien sûr, on ne parle pas des vingt cobayes de la base américaine de Guantanamo, en plein territoire cubain. Encore que leur statut juridique reste des plus imprécis («combattants illégaux qui n'ont aucun droit dans le cadre de la Convention de Genève», selon Rumsfeld ­ un expert), ceux-ci auront au moins donné prétexte à une exposition attentive de leurs conditions de détention. Ostentatoire présentation de leurs pyjamas orange et de leur alimentation, tout aussi «culturellement neutre» (sic) que les rations de survie larguées, entre les bombes, sur les réfugiés afghans; subtil distinguo entre les fonctions ablative et liturgique de deux serviettes de toilette par détenu, qui pourra ainsi en recycler une en tapis de prière; et distribution de corans, bien sûr, comme de bibles au chevet des clients de motel... Bien sûr, le camp de détention de Guantanamo, appelé à accueillir quelque 2 000 prisonniers, n'est pas celui de Terezin, en Tchéquie, où les nazis daubèrent efficacement la Croix-Rouge internationale sur le sort fait aux juifs qui y transitèrent avant l'ultime déportation ­ quand ils n'y mouraient pas de faim. Guantanamo, sur le modèle des usines en carton du socialisme réel dans Tintin chez les Soviets, a pourtant bien la fonction ane