On ne se connaît pas. Enfin, vous ne nous connaissez pas. Nous, nous avons la plupart de vos films au coeur, et pas seulement la Maison des bois, ce chef-d'oeuvre de télévision dont on se demande bien pourquoi il est si rarement rediffusé. Et puis voilà que vous vous exprimez dans Libération et que vous dites des choses navrantes et injustes envers vous-même et envers les autres. Qu'avez-vous besoin de faire de Bertrand Tavernier votre tête de Turc ? Il est vrai que le jeu est à la mode, y compris dans les colonnes du journal qui nous accueille aujourd'hui.
Pauvre petit jeu, pauvre petite mode. Pourquoi tant de haine à l'égard d'un cinéaste qui n'est pas votre ennemi, et dont, plus souvent que vous ne semblez le croire, le propos a rejoint le vôtre. Souvenez-vous de la liberté grande qui règne dans l'Horloger de Saint-Paul. Revoyez les scènes entre Michel Piccoli et Christine Pascal dans Des enfants gâtés, ce film méconnu, ignoré, dérangeant. Que vous a fait ce Tavernier qui, dans son dernier film, redit, comme vous, tout le bien qu'il faut penser de certains films d'Autant-Lara, l'éternel proscrit des cénacles bien-pensants et des anciennes nouvelles vagues ? Vous tirez à boulets rouges sur Laissez-passer, c'est votre droit, mais en l'occurrence vous semblez tirer contre votre propre camp. A moins que tout cela ne soit qu'une question de posture intellectuelle : c'est l'heure de la chasse au Tavernier, alors chassons le Tavernier ! On vous attendait ailleurs, pour vous dire