Dans la biographie que Jean Bothorel et Philippe Sassier consacrent à Ernest-Antoine Seillière (1), la femme de celui-ci, Antoinette, raconte comment le 14 juillet 1970 son futur mari, alors jeune membre du cabinet de Jacques Chaban-Delmas, avait traversé toute la France en voiture muni d'un clairon dont il tirait des notes discordantes à chaque village traversé. Trente-deux ans plus tard, le président du Medef emploie la même méthode. Il parcourt l'Hexagone le clairon à la bouche, n'hésitant jamais à produire les sons les plus assourdissants, sans craindre les couacs. Ernest-Antoine Seillière n'est pas Maurice André, mais sous sa conduite fracassante, pugnace et néanmoins extrêmement élaborée (avec son duumvir Denis Kessler), le Medef est devenu le groupe de pression le plus efficace de France. A côté de lui, même les agriculteurs semblent timides, même les médecins paraissent modestes.
Son irruption dans le débat électoral en constitue l'illustration la plus frappante. Ce n'est certes pas la première fois que le patronat y prend part. En 1981, le CNPF avait tout fait pour combattre les 110 propositions de François Mitterrand. De tout temps, les chefs d'entreprise ont cherché à défendre leurs intérêts, comme c'est normal, en intervenant s'il le faut sur la scène publique, en négociant plus souvent en coulisse, en influençant, en exhortant et, jadis, en payant. Désormais, c'est cependant de tout autre chose qu'il s'agit. Le Medef s'exprime ouvertement, vigoureusement, avec un