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Libération
TRIBUNE

De jeunes auteurs déjà si vieux

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par Alina REYES
publié le 7 février 2002 à 22h03

Vieux, Picasso ou William Burroughs étaient d'une extraordinaire jeunesse. Le rôle des artistes et des écrivains est d'apporter un regard neuf sur le monde. Ce fut le cas des Modernes, des libertins, des romantiques, des surréalistes, des auteurs de la beat génération, etc. Et en dehors des écoles, ce qui fait la pérennité de Cervantès, Sade, Dostoïevski, Joyce, Proust, Kafka, Céline et bien d'autres, c'est leur fraîcheur absolue, le fait qu'en leur temps, comme au nôtre, leurs textes détonnent dans le discours ambiant, sortent de l'harmonie du moment, du consensus, ou de la soupe médiatico-populaire qu'on nous sert tous les jours. Parfait, la littérature est là pour ça, nous sauver de la médiocrité et du nivelage sociaux, et nous aider à rester en vie en tant qu'êtres humains, c'est-à-dire à garder vivante la pensée.

Or la littérature aujourd'hui plus ou moins «best-sellerisée» par la critique rend un son de rengaine aussi pénible qu'un remix des tubes de Sheila, car plus le jeunisme fait loi, plus on constate que se croire jeune, c'est être vieux. Et tandis que dans les boîtes branchées on danse sur la chanson du Capitaine Flam, dans les journaux parisiens on s'éclate sur les derniers produits de la «jeune» génération littéraire (celle des employés du milieu et de ses ménagères de moins de 50 ans), laquelle recycle de livre en livre ses caprices d'enfant pourri, réfugié dans le mal-être comme le quidam dans une émission de Mireille Dumas.

L'auteur à la mode pratique le degré