Cette page «tribune» accueille dans «Libération» les idées et les points de vue partisans susceptibles d'apporter à nos lecteurs d'utiles éclairages sur les échéances électorales à venir.
«Est-il utile de tromper le peuple?» La question posée sans ambages par Frédéric II à Condorcet résonne comme un écho d'Ancien Régime, d'un siècle de despotisme plus ou moins éclairé, bien loin des exigences de transparence, de dialogue et de divulgation qui sont devenues les maîtres mots de notre vie publique. Et pourtant, à l'heure où candidates et candidats à la présidence de la République préparent calicots, arguments et ripostes, il est une sorte de secret dans le débat politique français. Un secret qu'hier ministre des Affaires européennes, aujourd'hui commissaire européen, il me semble d'intérêt général de livrer aux citoyens pour aider leur jugement.
Ce grand secret, c'est d'abord et avant tout que la plupart des décisions que les candidats vont s'engager à prendre avec la confiance du peuple ne relèvent plus d'eux seuls. En 1988, Jacques Delors avait annoncé que «dans dix ans, 80 % de la législation économique, peut-être même fiscale et sociale, applicable dans les Etats-membres seront d'origine communautaires». La proportion n'est pas exactement celle-là, mais les ministres de tous les gouvernements, les parlementaires assis sur tous les bancs le savent bien: transports, énergie, environnement, agriculture, industrie, protection des consommateurs, sécurité alimentaire, immigration,