Voici onze ans, arrivée aux portes de Bagdad, l'armée américaine avait épargné Saddam Hussein, pourtant qualifié par George Bush père de «nouveau Hitler». Un argument juridique fut invoqué par Washington, les résolutions des Nations unies n'autorisaient pas le renversement du despote irakien. Cette mansuétude américaine répondait surtout à des impératifs stratégiques. Aux yeux des Etats-Unis, la partition de l'Irak constituait une sérieuse menace pour leurs intérêts dans la région. Et seul Saddam Hussein était en mesure de maintenir l'intangibilité des frontières de son pays.
La population de l'Irak est divisée en trois composantes principales, les Arabes sunnites (20 %), les Arabes chiites (55 %) et les Kurdes (25 %). Les Kurdes, qui se soulevèrent en février 1991, poursuivaient alors l'idée de proclamer un Etat indépendant au nord de l'Irak. Une modification frontalière loin d'être anodine. Situé au nord de l'Irak, ce Kurdistan aurait englobé d'importants gisements de pétrole (notamment les puits de Mossoul et de Kirkouk). Une manne financière qui aurait permis de financer et d'aider les autres mouvements kurdes qui combattent dans la région, principalement dans la partie orientale de la Turquie. Le virus de la fragmentation risquait de se propager dans ce pays. L'intégrité territoriale de la Turquie méritait aux yeux de Washington de sacrifier ces rêves d'un Etat kurde. La Turquie, première armée au sein de l'Alliance atlantique après celle des Etats-Unis, constitue une al