J'ai 37 ans, habite les Hauts-de-Seine et ne connaissais pas bien l'histoire taboue de cette guerre, ni surtout le sort des harkis (Français abandonnés en Algérie, voués, pour certains, à mourir, et d'autres à être rapatriés).
Je tiens à vous raconter la vie de mes parents et de leurs enfants. Mes parents sont venus en France en octobre 1962 à Rivesaltes (Pyrénées-Orientales), dans un camp spécialement aménagé (toiles de tente, très précaires) pendant deux ans. Ils ne savaient ni lire ni écrire le français, pas plus que l'algérien. Ma soeur aînée et moi-même sommes nés à Rivesaltes. Les harkis ont été dispersés dans toute la France. Mes parents ont atterri dans les Bouches-du-Rhône, parqués dans des baraquements (sans WC ni douche...), deux autres enfants y sont nés. Ils y sont restés quatre ans.
Mon père, voulant trouver un travail, est allé avec un ami dans la région Poitou-Charentes en 1968, pour occuper un poste d'ouvrier d'usine. Trois autres enfants y sont nés. La politique française n'a jamais aidé mes parents à s'instruire, n'a accordé aucun soutien aux enfants, pas d'orientation scolaire. Nous avons été scolarisés au maximum jusqu'en troisième, sauf moi qui suis allé jusqu'à la seconde. Nous avons vécu seuls, sans famille (avec l'interdiction de retourner en Algérie, pour cause de «danger» de mort.)
Quarante ans après, la France reconnaît officiellement les harkis, des aides de «bonne conscience» leur sont allouées. Actuellement, mes parents sont toujours locataires, a