Jacques Chirac a eu une idée pour gagner en 2002 : mettre toute la campagne sur le terrain de l'insécurité, forcer chacun à y camper de gré ou de force, accueillir tous les faits divers comme autant d'opportunités politiques et faire le dos rond sur tout le reste.
Mais l'insécurité scandée de manière chronique depuis plus de trois mois parle d'un désarroi, d'une perte de repères, d'un affaissement des cadres de référence plus général. L'insécurité est devenue en effet la métaphore d'une situation politique et sociale : la perte d'autorité n'est pas seulement celle de la famille, c'est celle des syndicats, des structures intermédiaires, mais plus encore celle des institutions politiques, de l'exécutif. Et d'une certaine manière elle commence là où se trouve le politique, qui entreprend, qui décide, qui légifère, qui exécute.
Le développement des corporatismes et des communautarismes vaut tous les diagnostics sur le caractère flottant du système français.
Le fonctionnement de la société, et singulièrement celui du pouvoir, a atteint un exceptionnel niveau de brouillage. Les Français ont perdu l'intelligence du circuit de la décision, du qui fait quoi et comment, et qui le contrôle.
Où est le pouvoir ? Qui gouverne ? Ailleurs, quelque part dans le monde, du fait de mécanismes sur lesquels nous n'aurions que peu ou pas du tout de prise, à l'échelle européenne ou à Paris ? A l'Elysée ou à Matignon ou encore à l'Assemblée nationale, ou bien dans les régions ou éventuellement au niveau