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Libération
TRIBUNE

Les sirènes protestataires

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publié le 24 avril 2002 à 23h08

Ainsi, un bon tiers des électeurs vient d'émettre un vote de protestation. Mais que signifie ce vote, qui est venu pulvériser ce qui restait de l'opposition traditionnelle entre la gauche et la droite ? A l'extrême droite, le Front national n'a pas sombré, comme on pouvait l'espérer il y a deux ou trois ans au vu de ses querelles de chefs, du retour de la croissance, de la régression du chômage, ou de la victoire de la France au Mondial de football en 1998.

De ce point de vue, la France ne fait nullement exception, et les 17 % de Jean-Marie Le Pen au premier tour de l'élection présidentielle rappellent plutôt que notre pays est bien installé dans le mainstream européen. Encore faut-il distinguer deux logiques principales au sein des droites radicales en Autriche, en Italie, en Belgique, en Suisse, en Scandinavie, en Hongrie, etc. D'une part, elles capitalisent de puissants sentiments d'abandon et de chute, et sont portées par des catégories qui se vivent en perdition, ouvriers victimes ou inquiets de la désindustrialisation de leur ville ou de leur région, paysans réduits à la misère, et, plus largement, laissés-pour-compte du changement. Bien au-delà de la délinquance et des violences urbaines, l'insécurité renvoie ici à une perte généralisée des repères sociaux et culturels, à laquelle s'ajoute la hantise de périls externes ­ la mondialisation, la construction européenne ­ et internes ­ l'immigration.

D'autre part, les extrêmes droites mobilisent des milieux plus aisés, qui