Menu
Libération
TRIBUNE

Le cancer qui nous menace.

Article réservé aux abonnés
Il n’y a pas à tergiverser: le 5 mai, il faut voter pour Jacques Chirac.
par Vincent Lindon
publié le 26 avril 2002 à 23h10

Le Pen surgit, survit et progresse sur le malheur des gens. Ce n’est pourtant pas à ces gens que j’en veux. Ils sont terrorisés et n’ont plus le sang-froid qui permet de raisonner. Dans l’affolement, ils ont remplacé leur tête par un réflexe instinctif : ils se tournent vers celui qui parle si mal ­ d’ailleurs, si je suis de bonne foi, si perversement bien ­ de leur terreur et de leur malheur. Ce réflexe est aussi un repli vers ce qu’ils ont de plus mesquin et de plus bas en eux. Le Pen incarne cela, la face sombre de tout homme.

Dans les banlieues des grandes villes de mon enfance, on avait le souvenir d'un paysage à la Doisneau, à la Carné, à la Prévert. On y faisait du vélo avec les copains, entre le bistro, la belote, le bal musette et le bord de la rivière. Parfois, avec une fille, on s'en allait flâner dans la forêt. Aujourd'hui, il y a encore des forêts dans les banlieues, mais elles sont faites d'antennes et de paraboles. Et ces forêts sont des jungles. Il y a des voitures, le câble, des portables, mais c'est pourtant l'enfer. La violence ne s'abat plus sur quelques richards pris au piège des blousons noirs, mais sur tout le monde, les plus pauvres en première ligne. Les gens ont peur et ils sont malheureux. C'est à eux, d'abord, que je m'adresse car il ne faut pas les laisser de l'autre côté du fossé, de l'autre côté de la barrière.

Il faut qu'ils se persuadent, s'ils sont de gauche, tous les matins jusqu'au 5 mai et au plus profond d'eux-mêmes, que Jacques Chirac est