Il y a une lecture optimiste du livre de Paul Benkimoun sur l'accès aux médicaments dans les pays pauvres, en particulier les traitements antisida. En quelques années, les évolutions ont été spectaculaires, quasi miraculeuses. On est passé de la toute-puissance des industries pharmaceutiques qui décidaient, selon l'évolution de leur courbe de profit, de la sortie ou du retrait de tel médicament, à la défaite symbolique survenue lors du procès dit de Pretoria où lesdites entreprises ont été obligées de retirer leur plainte contre le gouvernement sud-africain qui entendait importer des génériques antisida.
En termes de discours ou de déclarations, les mois passés ont été ainsi jalonnés de victoires. Alors que dans les années 90, un grand nombre d'experts continuaient de dire que la question de l'accès aux médicaments des pays pauvres n'était franchement pas la priorité, que «la prévention était essentielle», et qu'en tout état de cause «les médicaments n'étaient pas faits pour eux, car trop compliqués à prendre à heure fixe, rendez-vous compte ?», aujourd'hui rares sont ceux qui osent encore tenir pareil discours. Les grandes firmes pharmaceutiques ont été contraintes de nuancer leur stratégie et d'intégrer en partie les notions de santé publique. Elles ne peuvent se contenter de répéter que «l'importation des génériques est un crime, remettant en cause leur existence même». Et surtout, ces firmes ont baissé très fortement le prix de leurs molécules pour les pays pauvres, ado