Voici le livre d'un honnête homme, celui d'un homme honnête. Jean-Paul Ngoupandé écrit depuis le coeur des ténèbres, de Bangui plus exactement, de cette Afrique des grands lacs et des forêts profondes où l'on s'entre-tue sans fin ni raison apparente. Il y a longtemps, vu de l'Hexagone, que la République centrafricaine (RCA) ne fait plus ni frémir, ni même rire. Il y a longtemps que les fastes grotesques et les basses atrocités de Bokassa n'intéressent plus personne. Même les bidasses français ont plié bagage ; la France est partie. En Centrafrique, la danse macabre se poursuit, mais à huis clos. Les fonctionnaires n'y sont plus payés depuis trente mois, l'armée est un patchwork de milices ethniques, l'élite a émigré en masse, les systèmes scolaire et de santé sont en ruine, le sida décime la population... Aujourd'hui, Jean-Paul Ngoupandé ne peut plus mettre les pieds à Bangui sans risquer de perdre la liberté... ou la vie.
Le président Ange Patassé, cerné par les complots réels ou supposés, ne doit sa survie qu'à la protection d'une centaine de soldats libyens et passe son temps à vitupérer l'Elysée, qui aurait tenté de le renverser au profit de son ennemi de toujours, le général Kolingba. Ce serait risible si pendant ce temps un pays tout entier ne sombrait pas dans un silence de mort. La Centrafrique illustre jusqu'à la caricature les maux de l'Afrique contemporaine. Jean-Paul Ngoupandé les énumère sans complaisance : ethnicisme, prédation, démocratisation dévoyée, gaspilla