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Libération
TRIBUNE

Profits mal acquis..

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par Lucien OSMONT et Régis TURRINI
publié le 2 octobre 2002 à 1h15

Les grands groupes n'ont jamais perdu autant d'argent. Ils viennent de pulvériser des records historiques. Les champions nationaux s'appellent AOL Time Warner pour les Etats-Unis (plus de 50 milliards de dollars), Vivendi Universal et France Telecom pour la France (27 milliards d'euros pour l'un, 20 milliards pour l'autre, en 2001 et début 2002), Vodafone pour la Grande-Bretagne (21 milliards d'euros). Souvenons-nous qu'il y a moins d'une décennie les pertes du Crédit lyonnais provoquaient un scandale national. Elles ne représentaient pourtant «que» 15 milliards d'euros environ.

Quel anabolisant a-t-il fallu ingurgiter pour réaliser de pareilles performances dans la course aux pertes ? Le cocktail dopant porte le nom de «dépréciation des survaleurs». La survaleur (le goodwill en anglais) représente la différence entre le prix d'acquisition d'une entreprise et sa valeur comptable actuelle. Lorsqu'au fil du temps on s'aperçoit qu'une société achetée ne rapportera jamais autant d'argent que prévu à l'origine, la valeur de ladite société diminue. Il faut alors traduire dans les comptes la différence entre le prix payé dans le passé et la valeur réelle d'aujourd'hui. C'est ainsi que naissent les pertes constatées en 2001 et 2002.

Comment expliquer qu'autant de grands groupes avisés aient pu faire d'aussi mauvaises acquisitions ? Depuis le milieu de la décennie 90, les prix des actifs industriels se sont envolés, suivant en cela la flambée boursière. Ce que l'on appelle la bulle spé