Chacun en convient : la décentralisation a besoin d'une nouvelle étape. Mais encore faut-il s'accorder sur ses enjeux. Derrière sa rhétorique populiste «la France d'en bas» , ses promesses imprécises expérimentation, péréquation, subsidiarité grosses de conflits juridiques à venir et d'inégalités, ses cadeaux les «transferts» de compétences aux élus locaux, gagés par une très hypothétique réforme fiscale, le projet Raffarin évite soigneusement ce qui pourrait fâcher : la question de la démocratie locale. On voit le piège, en particulier pour la gauche : ergoter sur telle ou telle compétence abandonnée par l'Etat sans s'intéresser aux conditions d'exercice du pouvoir dans les collectivités locales. Or, c'est bien là l'enjeu essentiel. Octroyer de nouveaux pouvoirs, certes. Mais comment les exercer ? Au bénéfice de qui ?
La France des collectivités locales est en réalité un système féodal structuré comme un mille-feuille de fiefs opaques où le pouvoir s'exerce au plus grand profit d'une corporation d'élus cumulards. L'impératif de séparation des pouvoirs, au coeur de la définition de la démocratie depuis plus de deux siècles, y est totalement ignoré. Au contraire, la confusion des pouvoirs est systématiquement organisée au bénéfice d'un pouvoir «exécutif» tout-puissant (maires, présidents de conseils généraux et régionaux). De fait, les patrons des collectivités locales en sont les seuls agents actifs. Ils préparent, font voter, exécutent les délibérations de leur as