L'incapacité de la France à établir des relations un tant soit peu confiantes avec l'Europe de l'Est restera un des traits marquants de l'après-1989. L'embardée calamiteuse de Jacques Chirac, traitant en somme ces pays de petits sauvageons, n'aura été que l'expression d'une attitude ancienne qui ne lui appartient pas en propre. Elle aura juste gravé un peu plus profondément une perception de la politique française déjà répandue dans la région. En gros, comme d'autres l'ont déjà souligné, celle qu'on reproche aux Etats-Unis : arrogante, imposant ses choix plutôt que d'écouter l'autre, ne lésinant pas à l'occasion sur la menace.
L'épisode aura souligné avant tout l'incapacité récurrente à «parler politique» avec les futurs membres de l'Union européenne. Jamais on n'a trouvé de langage commun. Cela a commencé dès les premiers mois qui ont suivi la chute du Mur, quand Mitterrand a brièvement avancé une proposition de confédération européenne : ceci venant à l'époque où la France tentait aussi de ralentir la réunification allemande, beaucoup ont conclu que ce pays était avant tout embêté par l'ouverture à l'Est et ne voyait là qu'un risque d'affaiblissement de son influence ; il ferait donc tout pour ralentir le processus et protéger ses intérêts la prééminence partagée avec l'Allemagne, l'Union monétaire, la politique agricole commune, etc.
De fait, pendant les années 1990, l'investissement européen de la France a porté presque exclusivement sur l'«approfondissement» notamment