Alors que la guerre fait rage en Irak, les tensions sont à peine moins vives entre les tenants européens d'un rôle majeur pour l'ONU dans l'après-guerre et des responsables américains partisans d'une gestion unilatérale. Nous retrouvons la même affirmation des grands principes que pendant l'avant-guerre : d'un côté, la France n'acceptera pas une résolution tendant à légitimer l'intervention militaire ; de l'autre, les néoconservateurs américains, désormais dans l'ascendant, au point où c'est l'ex-colombe Collin Powell qui rappelle le 26 mars que «nous ne sommes pas chargés de ce fardeau énorme (...) pour ne pas avoir un contrôle dominant sur la façon dont les choix vont se développer à l'avenir». Avec une différence cependant : cette fois, Tony Blair affirme sa volonté de voir l'ONU revenir au centre du jeu.
Cependant, les pétitions de principe américaine et française risquent de ne pas tenir longtemps devant les pressions des réalités qui ont leur logique propre. La première réalité, c'est la durée, l'étendue et la profondeur de l'implication du Conseil de sécurité dans les affaires irakiennes. Depuis août 1990, une vingtaine de résolutions majeures du Conseil de sécurité ont été adoptées qui touchent à tous les aspects du devenir stratégique, politique, humanitaire et économique de l'Irak, bien au-delà du sujet bien connu des armes de destruction massive, et au-delà de la récente reconduction des accords «pétrole contre nourriture». Il ne peut y avoir de normalité humanitai