«Je n'aime pas la guerre, mais parfois on ne peut pas l'éviter», a dit Bernard Kouchner. Moi non plus je n'aime pas la guerre. Que des hommes, qui ne se connaissent pas, puissent s'entre-tuer m'a toujours paru absurde. Née d'une famille qui a traversé l'Europe pour fuir la Seconde Guerre mondiale, j'ai été élevée dans le souvenir des déportations, des humiliations, des crânes d'enfant fracassés sans raison, de la faim, de la peur et de la mort systématique. J'ai grandi en espérant que je ne connaîtrais pas la guerre et que mes enfants en seraient préservés. Pourquoi au nom d'un pays, du caprice d'un roi, de l'orgueil d'un führer, d'un territoire à conquérir, d'une religion à défendre, des guerres ont-elles eu lieu et des hommes sont-ils morts ? Aucune de ces guerres n'était juste.
Aujourd'hui, George Bush est le cow-boy et Saddam le chef des Indiens. Sur le modèle des westerns de notre enfance, l'opinion publique du monde entier, cavalerie bien impuissante, soutenue par certains gouvernements, se rebelle et prend de fait la cause de Saddam, «tendre» dictateur. Tout en regardant la guerre en direct à la télévision. J'ose à peine regarder ces images. On imagine des femmes et des enfants qui se cachent et qui ont peur. Les yeux tournés vers le ciel, ils ne savent pas qu'on les regarde. Et ils me donnent envie de manifester pour la paix. Mais je pense au monde qui nous attend et qui est en train de se forger. Pour empêcher la guerre demain, peut-être faut-il la faire aujourd'hui.