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Libération
Critique

L'industrie pharmaceutique sans scrupule

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publié le 9 avril 2003 à 22h42

Au hit-parade des grands méchants du monde moderne, l'industrie pharmaceutique occupe désormais une place assez paradoxale, quelque part entre les marchands de canons et les dictateurs. Entre autres explications à ce phénomène, il y a bien sûr le procès de Pretoria, où l'on a vu 39 des plus grands labos du monde vouloir interdire aux malades africains du sida l'accès aux trithérapies, au nom de la défense de leurs brevets. Avant de reculer devant la réaction outrée de l'opinion publique. C'était en 2001 et l'effet de souffle de ce Vietnam moral n'en finit plus d'éclairer d'une lumière glauque le moindre scandale. Dans son Grand Secret de l'industrie pharmaceutique, Philippe Pignarre tente d'expliquer comment et pourquoi celle-ci «a dilapidé tout le capital de sympathie que lui avaient procuré les innovations thérapeutiques qui ont changé la vie des habitants des pays riches» pour apparaître aujourd'hui comme «un des secteurs du capitalisme parmi les plus avides au gain, les plus dénués de scrupule». Pignarre, ex-cadre dans un grand labo pendant dix-sept ans, réfute l'explication simpliste de la brochette d'ordures sacrifiant l'Afrique pour le confort de leurs actionnaires. Son «grand secret» est avant tout une crise de croissance : l'industrie pharmaceutique est acculée, dit-il, par un ralentissement phénoménal de l'innovation ­ de moins en moins de médicaments mis sur le marché chaque année, pour des budgets de recherche toujours croissants. Un effet ciseau qui menace l'exi