Le ministre de l'Education nationale nous promet un débat au Parlement sur l'école. Etant de ceux qui, dans un Manifeste pour un débat public sur l'école, ont souhaité ce débat, je ne peux que m'en réjouir.
Le problème est que, dans le même temps, le ministre nous gratifie d'une série de considérations dans sa Lettre à ceux qui aiment l'école (qui sont ceux qui ne l'aiment pas ?) qui ont plutôt tendance à enfermer ce débat dans une logique binaire, en durcissant des oppositions qui n'ont pas vraiment de consistance pour rejeter en bloc un point de vue sur l'école qu'on accuse de manière caricaturale d'être responsable de tout ce qui ne va pas.
Pour ma part, enseignant en collège ZEP depuis plus de vingt ans, je ne me reconnais nullement dans les oppositions qu'énonce notre ministre.
On aurait privilégié, nous dit-il, l'innovation contre la tradition, l'exaltation de l'esprit critique par rapport à l'humble reconnaissance de l'autorité de ceux qui détiennent le savoir, l'expression de soi de préférence au respect des normes, en particulier celles de la langue française, la centration sur l'élève au lieu des savoirs.
Comment peut-on avancer, avec l'autorité que confèrent la fonction de ministre et la qualité de «philosophe», une vision historique aussi unilatérale ? Ce tableau ne correspond en rien à ce qu'on connaît de la réalité de l'école française. Le cours magistral continue à dominer, notamment au lycée, et l'écriture personnelle est beaucoup moins pratiquée qu'on ne le dit.