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Libération

La finance contre l'entreprise

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publié le 19 mai 2003 à 23h03

«Je ne crois pas du tout au marché.» Voilà une phrase définitive qu'on ne s'attendrait pas à trouver sous la plume de Claude Bébéar (1), fondateur et président du conseil de surveillance d'AXA, souvent présenté comme «le parrain du capitalisme français». Elle lui a été inspirée par sa longue pratique des marchés financiers. On aurait tort de n'y voir qu'un coup de gueule médiatique, car l'analyse est sérieuse et documentée. Mieux que quiconque, Bébéar sait que la finance ne se résume pas au seul marché mais est le produit d'une architecture institutionnelle aux multiples rouages, qui a pour enjeu central le contrôle de l'information. Par ordre d'entrée en scène : les analystes financiers qui expertisent et recommandent les titres à l'achat ou à la vente, les agences de notation qui évaluent la solvabilité des entreprises, les auditeurs qui certifient les comptes, les banquiers d'affaires qui aident aux fusions et acquisitions, les investisseurs institutionnels qui gèrent les portefeuilles, les hedge funds qui spéculent et les patrons qui dirigent. Bébéar fait le constat que la financiarisation de ces dix dernières années s'est traduite par d'importants dysfonctionnements à tous les niveaux. Sur les erreurs récurrentes des analystes financiers, il nous rappelle que, six semaines seulement avant l'effondrement d'Enron, Goldman Sachs continuait à recommander le titre à l'achat en proclamant: «Enron, la meilleure des meilleures». Le cas des agences de notation est également inté