Monsieur l'ambassadeur des Etats-Unis au Liberia, jeudi dernier, George W. Bush a envoyé la flotte américaine croiser au large des côtes du Liberia. Cinq jours plus tôt, vous aviez trouvé trente cadavres devant votre porte, déposés par des Monroviens mécontents de votre passivité.
Depuis quelques semaines, de cessez-le-feu-réapprovisionnements en trêves-pillages, les combats se sont intensifiés pour tenter de faire tomber Charles Taylor, premier président libérien régulièrement élu en 1997. Celui qui avait contribué à libérer le peuple du dictateur Samuel Doe s'est avéré être le digne héritier d'une dynastie de tyrans qui se liquident entre eux depuis vingt ans.
Poursuivi pour crimes contre l'humanité, Charles Taylor est allé trop loin. Dans ce pays aux traditions de gouvernance pourtant peu regardantes sur l'abus de pouvoir et la prévarication, les ennemis-alliés avec lesquels il devait partager le gâteau ont fini par vouloir sa peau. Et l'Histoire s'est remise en boucle. Comme me disait, en 1996, l'un des rares intellectuels modérés encore vivants à Monrovia, le juriste historien libérien Henry Andrews : «A chaque fois qu'on veut sortir de la marmite bouillante, on tombe dans le feu !»
Qu'est-ce que trente cadavres à côté des sept cents ou mille morts qu'il y a eus à Monrovia en quelques jours ? Et des cent soixante mille morts en vingt ans ? Sept pour cent de la population exterminés par les escadrons de la mort, des soudards anthropophages, des enfants assassins sous des ma