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Libération
Critique

Guerre d'Algérie: les centres de regroupement.

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publié le 1er août 2003 à 0h29

En dépit des apparences, Michel Rocard ne publie pas un nouveau livre. Bien au contraire, c'est l'un des plus anciens textes de l'ancien leader socialiste qui est aujourd'hui réédité, accompagné d'un riche appareil historique. Il s'agit d'une «Note sur les centres de regroupement», rédigée durant l'hiver 1958-1959. Elle attira alors l'attention du public sur le sort ignoré d'environ un million d'Algériens musulmans, «regroupés» par les autorités françaises dans ce qu'on appellerait aujourd'hui des camps de réfugiés, frappés par une forte mortalité infantile et menacés par la famine.

Déjà militant socialiste, Michel Rocard est alors un jeune inspecteur des Finances. A la sortie de l'ENA, il est envoyé en Algérie. Là, sous couvert d'une enquête sur les problèmes fonciers, il parcourt le pays et visite les «centres de regroupement» installés par l'armée. S'inspirant des théories de la guerre révolutionnaire, les militaires vident les campagnes de leur population pour éviter que les combattants fellaghas n'y soient «comme des poissons dans l'eau». Les conséquences humaines sont dramatiques. Discrète, l'enquête de Michel Rocard n'est pas clandestine. Il la réalise à la demande officieuse du gaulliste Paul Delouvrier, délégué général du Gouvernement en Algérie, qui tente de reprendre la situation en main. Transmise à Paris, cette note de style très administratif, est rendue publique ­ sans le nom de l'auteur ­ par le cabinet du ministre de la Justice Edmond Michelet ! Michel Rocard