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Libération

A l'insu de son plein gré

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publié le 9 octobre 2003 à 1h19

De jour en jour, et quelle que soit la pugnacité que nombre d'observateurs veulent bien prêter aux juges de Nanterre, on peut d'ores et déjà préjuger que le prévenu Juppé sortira à peine défroissé de ce tribunal. Le parquet ayant bien rangé le dossier dans ses plis, la prise illégale d'intérêt reprochée à l'ex-secrétaire général du RPR le dispense de rendre compte de bien d'autres turpitudes, en ces affaires d'emplois fictifs à la Mairie de Paris. Et les choses roulent à peu près comme prévu, n'était la propension des «clandestins» du RPR ­ comptables, eux, d'abus de biens sociaux ­ à se défausser et reconnaître dans le cri du coeur d'Yves Cabana (alors bras droit de Juppé) : «Tout le monde savait.»

Tout le monde savait, mais, à l'en croire, Alain Juppé ne savait pas. Et une fois encore, ce que l'on regarde, dans les prétoires, avec une fascination toujours renouvelée, ce n'est pas l'expression d'une vérité qui sortirait du puits, débusquée par les juges. Ce qu'on observe, c'est l'exercice du droit, et, au premier chef, celui des prévenus ayant celui de dire qu'ils ne savent pas, qu'ils ne savaient pas, en signifiant très fort : «Je sais que vous savez que je sais.» Les yeux dans les yeux, «ma vérité, toute ma vérité»... Un rapport de forces externe, les conseils avisés d'un défenseur choisi, la familiarité d'un sourire moqueur sous une déférence affichée, mâtinée de cette arrogance de puissant propre à intimider les juges, (ne fût-ce qu'un tout petit peu ­ mais ce tout petit