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Libération
TRIBUNE

Un orchestre sans instrument

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par Guillaume Bigot
publié le 21 octobre 2003 à 1h28

«L'Europe ? Quel numéro de téléphone ?» C'est avec ironie que l'ancien dirigeant américain Henry Kissinger rappelait aux Européens l'inconsistance de leur diplomatie commune. Une ironie qui ne sera bientôt plus de saison ? Si l'on en croit les commentateurs, le projet de Constitution pour l'Europe permettrait à une authentique politique étrangère et de sécurité de voir le jour. Si ce texte, rédigé sous l'autorité de Valéry Giscard d'Estaing, entre en vigueur, le vieux continent aura enfin le téléphone ! Même les eurosceptiques en conviennent : ce «brouillon» institutionnel pourrait créer l'indispensable contrepoids à l'hégémonie américaine que tout le monde appelle de ses voeux. Voilà du moins ce que l'on peut lire dans la presse. Hélas, si l'on s'en tient au texte du projet, et à lui seul, on réalise que, sous la plume de Giscard d'Estaing et de ses «conventionnels», la «politique étrangère et de sécurité commune» reste une simple intention.

En premier lieu, la «Constitution Giscard» instaure un «ministre des Affaires étrangères». Nommé à la majorité qualifiée du Conseil (donc des Etats), le patron de la diplomatie de l'Union sera légitime et respecté. La règle de la majorité qualifiée fait qu'il pourrait même ne pas s'agir d'un personnage falot ni d'un ancien secrétaire général de l'Otan (deux caractéristiques parfaitement compatibles). Elu pour deux ans et demi (on en finirait donc avec la cacophonie des présidences tournantes), ce diplomate supranational sera également vi