Sauvons le lundi de Pentecôte que des ministres irréfléchis voudraient ravaler au rang d'une journée ordinaire, c'est-à-dire travaillée. Deux raisons : l'une psychédélique, l'autre économique et industrielle.
Psychédélique d'abord. Qu'est-ce que la Pentecôte ? C'est, comme son nom grec l'indique, le cinquantième jour après Pâques, jour de la résurrection du Christ qui mérite lui aussi notons-le au passage un lundi de repos. Or, ce cinquantième jour, le Saint-Esprit descendit sur les apôtres, posa des languettes de feu sur leurs têtes et les gratifia de glossolalie, c'est-à-dire du don des langues. Les commentateurs les plus pratiques en conclurent que les apôtres pouvaient parler toutes les langues sans les avoir apprises. Le Grand Larousse du XXe siècle, plus réaliste, donc plus visionnaire, écrivait ceci dans son édition de 1930 : «Ceux qui recevaient ce don étaient saisis d'un brusque enthousiasme et s'exprimaient tout à coup dans une langue inintelligible à l'assemblée et à eux-mêmes.»
Un brusque enthousiasme ? Un langage incompréhensible ? Les amateurs de visions psychédéliques et quelques chercheurs inspirés ont immédiatement reconnu les ferveurs agitées et prophétiques que l'on partage après avoir consommé de l'ergot de seigle. Ce puissant hallucinogène est resté longtemps en usage dans les franges de l'Eglise et l'on put en voir les plus hystériques manifestations chez les convulsionnaires de Saint-Médard au XVIIIe siècle.
Bref, on comprend que les apôtres aient eu